jeudi 11 septembre 2008

Fin du voyage

Ce n'est pas parce que cet article est tardif, illustré uniquement par des photos issues de la toile - appareil photo oublié à l'arrière d'un rickshaw - que cet article n'a pas lieu d'être. On n'a faibli que dans la dernière ligne droite, tels Laure Manaudou. Mais on compte bien reprendre nos aventures hollandaises à la manière d'Alain Bernard, et pour cela, autant solder les vieilles histoires.

C'est donc reposés, régénérés que nous sommes revenus des montagnes. Pleins d'entrain pour passer notre dernière semaine «dans la vraie Inde ». Pleins de beaux principes. Parce que une fois à Delhi, dans la touffeur de la mousson, dans la jungle des arnaqueurs, on s'est senti sans défense, comme une jeune championne olympique à peine majeure au milieu des micros. Les derniers billets de train et une paire de sandales achetés, on s'est terrés sur Internet, comme des autruches. Le train de nuit pour quitter la grande ville, folkorique, nous a redonné du peps. En effet, nous n'avions qu'une seule couchette de réservée, dans un carré de six occupé par une bonne douzaine d'âmes. Auxquels s'ajoutent nonchalemment trois Coréens. On fait les comptes : il y a notre single billet, ceux d'un couple anglo-américain, puis donc les trois Asiatiques, et lesdits comptes sont bons : tous les Indiens ici présents sont des fraudeurs. Après avoir fait mine de déserter lorsque la folle rumeur de la montée d'un contrôleur a parcouru le wagon, ils sont restés, en masse. Restés assis sur nos sièges tant que nous ne dormions pas encore, puis entassés un peu plus loin. C'est aussi ça l'Inde, les fraudeurs de bonne foi, ceux qui ne rechignent pas à quitter la place quand nous en avons besoin, mais qui ne comprendraient pas qu'on les vire alors que nous sommes encore assis. Quant à moi, c'est par terre que j'ai dormi. Je ne suis pas khôte clochard pour rien.


Le lendemain, c'est un immense marché à touristes qui nous attendait. Pushkar ça s'appelle, paraît-il. Des alignements de boutiques d'habits et de pizzerias, de revendeurs de statues et de cyber-cafés. Tenus par des gens paisibles, pas agressifs pour un sou. Et finalement, Pushkar, l'immense marché à touristes, c'est pas si mal. Parce que dans un marché pour Indiens, on a beau trouver sans difficulté des pièces détachées de machine à laver, du tissu au mètre et des bassines, ce n'est pas forcément ce dont vous rêvez comme souvenir d'Inde. Faire les courses à Pushar juste avant de partir, c'est comme faire un tour au buffet du Flunch avant le vendredi saint : pas le plus raffiné, mais plutôt utile. Ah oui, j'allais oublier... Pushkar, c'est la deuxième ville la plus sainte pour les hindous, c'est le lac où ont été dispersées les cendres de Gandhi. Jour de festival, on a eu la chance de voir des jeunes pour le moins motivés faire une chaîne pour remonter l'eau du lac jusque une grande cuve percée, d'où l'eau redescendait vers le lac. Et ce en plusieurs endroits. Très étrange au demeurant, mais quand on y pense, un hindou observant des Chrétiens se rendre à genoux à Fatima ou des Chiites s'auto-flageller à Kerbala ne doit pas moins en penser. Mais ce rituel est bien étouffé par le côté commercial du lieu. Les pélerins devaient penser que j'étais étouffé par la chaleur, ce doit être pourquoi ils m'ont balancé un seau d'eau. En tout bien tout honneur.


Bundi, étape suivante du périple, n'a pas reçu les même suffrages. Bertrand y a apprécié le calme de la bourgade, ainsi que son palais à moitié en ruines, je l'ai trouvée quelconque pour ma part. En plus, les chauves-souris ont envahi ledit palais, leurs odeurs en ont fait de même. Enfin bon, c'était pas désagréable non plus.

Udaipur, c'est plus grand. Le palais y est d'un autre standing, peuvent en témoigner le million de visiteurs annuels (80 % d'Indiens, 10 % de Français, les autres, bof bof). Le petit périmètre autour dudit monument est empli par les Blancs, qui ne s'aventurent pas à plus de deux cent mètres de là. C'est bien dommage pour eux, la vie y est pourtant plus tranquille. Il faut dire que face au palais est un joli lac, romantique paraît-il. Je n'ai pas succombé au charme de Bertrand le brun ténébreux pour autant, malgré la petite promenade en bateau que nous nous sommes accordée.


Antépénultième étape, Mount-Abu. En compagnie de deux Suissesses à l'accent râpeux, dans la région pour cinq mois pour la première, deux fois plus pour la seconde, qui poussera jusqu'en Thaïlande y apprendre les massages. En leur compagnie nous avons découvert de magnifiques temples jaïns. Là où les Hindous sculptent la face et le ventre des personnages ou des éléphants dans les murs, eux font tout le corps, creusant donc derrière le dos. En découle une impression de dentelle presque affriolante, une beauté touchante même pour un inculte comme moi. Il faut dire que les artisans étaient payés en fonction de la poussière que leur travail produisait, afin de les pousser au raffinement le plus abouti. Du travail de maître, vraiment. Deuxième et dernière attraction de Mount Abu, le lac. Pas artificiel comme son comparse d'Udaipur, non môssieur. Un lac joli comme tout, un lac de montagne, car, si les Indiens sont parfois déroutants, Mount Abu est tout de même bien nommé. Avant de partir, on offre aux Suissesses nos médicaments anti-diarrhée, notre Lonely Planet, notre crème solaire et notre manuel d'hindi. Que nous quittons à regrets, mais bon, autant en France qu'aux Pays-Bas, ils ne nous auraient que peu servi.

Enfin, deuxième visite de Bombay, après celle pré-mousson de juin. Et bien, la température y était supportable, la ville plutôt agréable, et le crabe d'un kilogramme que Bertrand a dévoré franchement formidable. Deux trois dernières courses, un bon repas donc, une bière en regardant l'Inde rouster le Sri Lanka - au cricket, évidemment - ainsi se sont terminés nos cinq mois. Avec un peu d'émoi, oui mâdame, mais c'est pas comme si notre avenir était sombre comme un ciel d'hiver aux Pays-Bas. Trouver un appartement, se faire de nouveaux amis, tant recevoir quiconque le désire qu'aller visiter l'Europe, et peut-être travailler un peu, on ne va pas s'ennuyer. Heureusement, parce qu'on n'en a plus l'habitude.

Aucun commentaire: